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Concert

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Concert

« Ce sont des musiques populaires, mais pas seulement… ce sont des esthétiques musicales qui viennent des musiques du monde et d’ici, des musiques d’aujourd’hui qui vont chercher leur identité dans la marmite des musiques traditionnelles… »

MISSIONS

En 1998, Bertrand Dupont, conseiller artistique, et Cécile Borne, chorégraphe et plasticienne, enracinaient leur projet de vie culturel en Kreiz Breizh, dans le bar-hôtel-restaurant de Langonnet, devenu La Grande Boutique, « friche articole ». Le lieu accueillait alors les projets de trois associations : la compagnie chorégraphique Aziliz Dañs, l’association du festival nomade Dre ar Wenojenn, DAW, et AMAB Ton All Produktion, société de production dédiée aux musiques d’aujourd’hui en Bretagne.
Vingt ans plus tard, sans les deux premières entités, le paysage s’est modifié. L’association La Grande Boutique est désormais propriétaire d’un lieu devenu centre de création de musiques populaires en Centre Bretagne. Une scène de territoire conventionnée qui « travaille à la rencontre et à la valorisation de la création artistique musicale bretonne, en accompagnant les artistes de Bretagne, et les artistes d’autres cultures du monde ».

Le projet artistique musical impulsé par Bertrand Dupont, directeur de La Grande Boutique s’est enraciné et pris des ailes. « C’est un projet fantastique, si singulier dans le décor hexagonal, car nous travaillons à accompagner à 360° des artistes en création sur des musiques actuelles issues des musiques traditionnelles ». Et Bertrand Dupont de préciser : « Ce projet est étroitement lié à la société de production musicale AMAB Ton All Produktion. Accompagner les artistes que nous accueillons ici en résidence pour leur création, les faire tourner et les enregistrer, c’est le rôle de la structure de production que je dirige ». Et d’ajouter : « Je suis aussi gérant non salarié d’Innacor Records & Booking, label créé avec Jacky Mollard et Erik Marchand, qui a vocation à diffuser les musiques d’aujourd’hui en Bretagne ». Le label, comme la société de production, participe du projet artistique de La Grande Boutique. Et Bertrand Dupont de citer la création de Ceòl Mòr de Patrick Molard et ses cornemuses écossaises dans une version orchestrale, à l’automne 2015.

Malgré cette dynamique, Bertrand Dupont fait le constat des difficultés à produire et à diffuser une musique pointue et singulière. « C’est onéreux et fragile, car il devient de plus en plus complexe de trouver des relais de co-production et de diffusion », pointe Bertrand Dupont. Ce dernier souligne l’importance de labelliser des lieux de création et d’expérimentation comme celui de Langonnet pour créer une synergie. Autre problématique que soulève le directeur : celle de la circulation des œuvres et des artistes dans le monde, liées notamment aux difficultés d’obtention de visas.

Toutes ces productions contribuent à irriguer la dynamique de ce territoire de Centre-Bretagne. En 1997, c’était dans le cadre de DAW : un premier festival de trente dates, sur deux mois, et une trentaine de partenaires. Aujourd’hui, La Grande Boutique et ses partenaires proposent une programmation saisonnière, à l’année : « Le Plancher, scène du kreiz breizh ». Celle-ci se veut itinérante sur un bassin de population drainant quelque 100 000 habitants, à la jonction de trois départements, avec un public fidèle, mais aussi renouvelé. Cette programmation recentrée sur le territoire bénéficie de l’appui d’un réseau associatif dynamique, malgré un déficit chronique de lieux pour accueillir les artistes dans de meilleures conditions. Devant ce constat, Bertrand Dupont lance une nouvelle réflexion : « Le projet serait de transformer l’ancienne salle de bal de La Grande Boutique, en conservant son parquet, en salle de spectacles de 300 places pour répondre aux attentes du territoire ».

Autre volet, moins visible : l’action culturelle menée en direction des jeunes du territoire. Ce sont des activités « Musique du Monde », proposées aux communes dans le cadre des temps d’activités périscolaires par exemple. « Par ailleurs, trois spectacles invitent le jeune public à vivre une expérience unique de musique populaire du monde. C’est une approche culturelle et géopolitique qui est proposée », explique le directeur. Depuis cinq ans, deux fois par an, est publié le magazine culturel du Plancher le Kreizy Breizh, fruit de la découverte de collégiens et lycéens invités, accompagnés d’un journaliste, d’un photographe et de leurs enseignants. « Cette publication est le reflet d’une vraie découverte pour ces jeunes dont certains n’ont jamais vu de concert », souligne Bertrand Dupont.

En fonction des artistes invités et de la présence de partenaires privilégiés tels DROM et Erik Marchand, s’organisent des master-classes avec les écoles de musique, des répétitions publiques. De belles opportunités se font jour : « Nous envisageons de créer des chroniques radiophoniques avec des jeunes, diffusées sur une web-radio, avec l’appui d’Antoine Chao, réalisateur de l’émission « Là-bas s’y j’y suis » de Daniel Mermet sur France Inter. Il est venu présenter une création sonore à partir de sons et de musiques de luttes et de résistances, glanés pendant des années de reportages », précise Bertrand Dupont.
Ce dernier sait pouvoir bénéficier d’un réseau privilégié tissé au fil des années. Citons la rencontre avec Françoise Degeorges, journaliste à France Musique, productrice de l’émission Couleurs du monde qui a donné corps au festival éponyme. Un temps fort de quatre jours pour mettre en lumière les approches singulières, avec une dizaine de groupes qui expriment leur art devant un millier de spectateurs : « Nous sommes sur une programmation exigeante, avec de petites jauges qui favorisent une proximité avec le public et une belle qualité d’écoute … », souligne Bertrand Dupont.
Et celui-ci de conclure : « À La Grande Boutique, c’est la dynamique de création et celle de la programmation de saison, avec une action culturelle de territoire, qui nourrissent ces aller-retour entre un ici, un ailleurs et le monde. C’est cela qui fait de notre projet sa singularité et permet d’avoir un œil dépoussiéré pour amener la création contemporaine en Bretagne… ».

Christine Barbedet – avril 2016